7 octobre 1571 : Lépante, jour de deuil de l’empire Ottoman
L’empire Ottoman avait connu son apogée avec Soliman le
Magnifique, mort en 1566. Son successeur Sélim II, décida de conquérir Chypre,
possession de Venise et relais essentiel du commerce de celle-ci en
Méditerranée. Inquiet de cet expansionnisme musulman, le pape Pie V décida de soutenir
la lutte de Venise et mit toute son énergie à réunir une coalition, baptisée « Sainte
Ligue ». Elle réunissait les flottes de Venise, d’Espagne, de la
république de Gênes (avec des soldats et marins Corses), des états pontificaux,
du duc de Savoie (3 galères niçoises) et des chevaliers de Malte. Le
commandement en fut confié à Don Juan d’Autriche demi-frère du roi d’Espagne Philippe II.
La flotte turque était abritée dans le Golfe de Patras, antichambre du Golfe de
Corinthe.La flotte chrétienne se rangea en ordre de bataille à l’aube du 7
octobre : au centre Don Juan commandait l’escadre principale, à l’aile
gauche le Vénitien Agostino Barbarigo, à l’aile droite Gian Andrea Doria,
au total environ 200 galères et, nouveauté décisive, 6 galéasses, grosses
galères à forte voilure, armées de canons fixes. La flotte turque, de 270
vaisseaux dont 210 galères, poussée par un vent favorable se déploya. Face à
Don Juan, le « Kapudan » Ali Pacha, à droite, le gouverneur d’Égypte,
Mohammed Sirocco, à gauche le corsaire Eudj Ali, renégat Calabrais, bey d’Alger.
D’emblée, les 6 galéasses placées devant la flotte
chrétienne, dévastent par leur artillerie fixe de gros calibre l’infanterie
turque massée sur les ponts des galères, assurant dès lors une supériorité
décisive à la coalition pour le corps à corps qui suit l’abordage dans les
combats navals de cette époque. Le deuxième facteur décisif est l’usage massif
d’arquebuses par les fantassins embarqués sur les galères chrétiennes, alors
que les turcs utilisent principalement des arcs. La galère amirale turque est
prise dès le début de la phase d’abordage, Ali Pacha est tué et sa tête est
hissée en tête de mât pour saper le moral des Turcs. À l’aile gauche le combat
tourne également rapidement à l’avantage des galères de Barbarigo. Seule l’aile
droite de Doria, à qui fut reproché son attentisme, aux prises avec le fin manœuvrier
qu’est le corsaire Eudj Ali, laisse échapper l’adversaire, qui a ravagé les
galères des chevaliers de Malte seuls à avoir donné l’assaut.
À part ces quelques galères, toute la flotte turque est
prise ou coulée, ses pertes humaines sont terribles, 30 000 morts ou
blessés, 4 000 prisonniers, dont beaucoup moururent en captivité.
Le retentissement et la liesse de la victoire furent énormes
dans toute la chrétienté (sauf en France, alliée des Turcs contre l’Espagne). L’impact
géostratégique réel resta modeste : Chypre était tombée en août, et Venise
fit une paix séparée avec les Turcs, lui
en reconnaissant la possession ; la flotte turque fut rapidement
reconstituée en vaisseaux, sous le commandement d’Eudj Ali et, 4 ans plus tard
les Turcs reprirent définitivement Tunis à l’Espagne, consolidant leur pouvoir
sur toute la rive sud de la Méditerranée. Il n’y eut plus de grand affrontement
naval mais les corsaires barbaresques continuèrent leurs razzias sur les côtes
chrétiennes pendant plus d’un siècle.