vendredi 26 février 2016

25 février 1916 : Douaumont ist gefallen !


4 jours après le début de leur offensive, les Allemands ont progressé de 4 km en direction de Verdun et arrivent en vue du fort de Douaumont ; ce fort gigantesque fait partie de la ceinture fortifiée de Verdun mise en place après la défaite de 1870. Établi sur le point culminant des côtes de Meuse, il domine tout le champ de bataille. Sa maçonnerie initiale a été renforcée d’une carapace de béton sur une épaisseur de 2,5 mètres, avec une couche de sable destinée à amortir les impacts directs d’artillerie lourde.  Il donne accès à des galeries souterraines totalement hors d’atteinte des pièces d’artillerie les plus puissantes. Cependant, c’est un tigre de papier : par un décret d’août 1915 tous les ouvrages fortifiés de l’Est  ont été déclassés, leurs pièces lourdes ont été récupérées pour préparer l’offensive de la Somme que Joffre espère capable de créer une rupture de front. Dans le fort désarmé, les personnels aguerris, fantassins et artilleurs, ont été remplacés par une simple équipe de « gardiennage » constituée de territoriaux. De fait, alors que le combat fait rage sur toute la ligne de front, les allemand remarquent vite que le fort est silencieux et qu’aucune de ses pièces d’artillerie ne les prend à partie. Une escouade de reconnaissance parvient à franchir le fossé et devant l’absence de réaction, pénètre dans le fort où les quelques territoriaux qui l’occupent sont capturés sans résistance.

Cette divine surprise est immédiatement exploitée par la propagande allemande, tous les journaux proclament cette prise en laissant entendre que la percée à Verdun est imminente.  La suite de la bataille démentira cet optimisme. Il n’en reste pas moins que les installations du fort, au cœur de la 1° ligne des combats vont fournir aux Allemands un avantage logistique incommensurable, leur permettant d’abriter hommes et matériels et d’établir des batteries d’artillerie d’autant plus dévastatrices qu’ils dominent  tout le champ de bataille. Une sanglante offensive pour reprendre le fort échouera en mai en faisant des centaines de morts et il faudra attendre octobre pour reprendre enfin le fort avec de lourdes pertes. Au total, Pétain estimait que l’abandon du fort avait causé la perte de 100 000  combattants français, tués ou blessés.

21 février 1916 :
au bois des Caures, Driant et ses chasseurs font face à la déferlante allemande.

La position du bois des Caures, à 10 km au nord de Verdun, est en pointe face à l’offensive allemande qui se prépare. Le lieutenant-colonel  Driant l’occupe avec deux bataillons de chasseurs. Émile Driant est célèbre en France. Officier venu en politique (il est député de Nancy) après une carrière militaire interrompue après l’affaire des fiches, il avait également écrit des ouvrages d’anticipation sur le thème des guerres futures. À la déclaration de guerre, il a 59 ans mais demande sa réintégration avec un commandement en première ligne. En 1915 il alerte à plusieurs reprises le commandement puis les politiques, sur la faiblesse de la position de Verdun, dont la plupart des forts ont été quasi-désarmés, notamment pour affecter leurs canons lourds à la préparation de l’offensive de la Somme. Ses demandes de renforcement du secteur sont restées vaines mais il prépare énergiquement la défense  de sa position faisant établir par ses chasseurs tranchées et redoutes.
Au matin du 21 février, les Allemands déclenchent l’attaque par une préparation d’artillerie gigantesque, qui  va durer 10 heures et déchiqueter les hommes et les arbres sur toute la 1° ligne française. À 16 heures, les tirs d’artillerie s’allongent et les fantassins de deux divisions allemandes s’avancent pour occuper le terrain. Driant et une poignée de chasseurs survivants émergent alors des abris et leur feu nourri bloque les premières vagues allemandes, stupéfaites de rencontrer une résistance là où on leur avait assuré qu’il ne resterait plus que de la terre labourée par les obus.
Au soir les chasseurs survivants ne sont plus qu’un quart de l’effectif initial (300 à 400 sur un effectif de 1300 avant l’attaque), mais ils s’accrochent au terrain et reprennent même une position avancée. Le matin du 22 voit cependant revenir les vagues d’assaut allemandes (deux divisions allemandes étaient en pointe sur ce secteur) contre lesquels les chasseurs épuisent leurs dernières munitions dans des combats acharnés. Driant organise alors le repli de ses soldats vers Beaumont, et quitte la position avec les derniers lorsqu’il est mortellement atteint.
Le sacrifice de Driant et de ses chasseurs a permis d’acheminer en toute hâte des renforts devant Verdun et d’empêcher une percée décisive des Allemands. Il a surtout eu un énorme retentissement dans la France entière et galvanisé l’esprit de résistance qui allait permettre la victoire de Verdun mais à quel prix effroyable : 160 000 morts chez les Français, 140 000 du côté allemand et des dizaines de milliers d’invalides.

dimanche 14 février 2016

19 février 1836 : exécution de Fieschi, enfant perdu de Murato.


Le 25 juillet 1835 il avait mis à feu, boulevard du Temple, une machine infernale de son invention, préfiguration des « orgues de Staline » visant le cortège royal à l’occasion de la célébration du cinquième anniversaire de la Révolution de Juillet. Louis-Philippe ne fut pas atteint mais l’attentat fit 19 morts dont le maréchal Mortier.
Fils d’un berger de Murato, Giuseppe Fieschi s’était engagé dans l’armée à 16 ans alors que son père était emprisonné pour vol. Il combattit avec courage sous les ordres de Murat lors des campagnes de Russie et de France. Après la chute de l’Empire il resta au service du Roi de Naples mais le trahit une première fois en vendant des renseignements aux Autrichiens qui facilitèrent leur victoire de Tolentino, puis en livrant les plans du débarquement de Pizzo de Calabre où Murat et ses compagnons furent pris et fusillés. Rentré en Corse, il fut condamné en 1819 à dix ans de réclusion pour un faux en écriture. Après sa libération, se faisant passer pour une victime de la Restauration, il fut réintégré dans l’armée, mais ses incartades firent découvrir ses falsifications et il fut chassé de l’armée en 1834. Hébergé par des anarchistes, il mit  au point le dispositif de l’attentat contre Louis-Philippe. Blessé par l’explosion de sa machine, il fut arrêté et jugé avec ses complices au cours d’un procès qui passionna l’opinion.
Les débats révélèrent sa  personnalité que l’on qualifierait aujourd’hui de psychopathe narcissique et il fut condamné à mort et guillotiné avec ses complices au rond point de la barrière Saint-Jacques.

Le  Musée Carnavalet conserve un tableau macabre de sa tête « décollée », œuvre deJacques-Raymond Brascassat.