lundi 28 juillet 2014

6 août 1284 : La république de Pise sombre à la bataille de la Meloria.



Au cours de la 2° moitié du XIII° siècle, la rivalité grandit entre Pise et Gênes, deux des « républiques marines » qui s’étaient alliées pour chasser les barbaresques de la méditerranée occidentale et développer un fructueux commerce. La Corse, sous double souveraineté pisane et génoises, cristallisait cet antagonisme. Simoncello, Giudice di Cinarca, soutenu par Pise s’oppose à Giovanninello di Loreto, partisan de Gênes. Battu, Simoncello se réfugie à Pise et prétend avoir été attaqué sans motif par les génois. Les deux républiques entrent en conflit sur mer à partir de 1282 mais, si les génois prennent le plus souvent l’avantage, aucun combat n’est décisif. En août 1284, les génois commandés par Oberto Doria décident d’en finir avec la flotte Pisane commandée par un podestat vénitien, Alberto Morosini. La flotte pisane s’est mise à l’abri à l’embouchure de l’Arno, barrée par des chaînes. Les génois sont en supériorité numérique et, pour faire sortir la flotte pisane, ils ne présentent qu’une partie de la flotte en vue des pisans devant l’îlot de la Meloria. L’autre partie, sous le commandement de Benedetto Zaccaria, reste en retrait, hors de vue des pisans (la longue vue ne sera inventée qu’un siècle plus tard). Les galères pisanes se lancent alors à l’assaut des galères génoises et le combat fait rage lorsque surgit Zaccaria sur le flanc des pisans. D’après la chronique, deux galères de Zaccaria, réunies par une chaîne balaient les superstructures et l’oriflamme de la galère amirale de Morosini. C’est la déroute de la flotte pisane, 5000 hommes sont tués, 9000 prisonniers sont emmenés dans les prisons gênoises (de là naquit le dicton cruel : « Chi vuol vedere Pisa, vada a Genova »,). Cette saignée porte un coup mortel à la cité dont le port sera détruit par les génois l’année suivante, les tronçons de la chaîne barrant l’embouchure de l’Arno seront répartis comme trophées dans les monuments gênois.
Gênes a dorénavant le champ libre en méditerranée et en Corse …

lundi 21 juillet 2014

27 juillet 1214 : BOUVINES

Consolidation définitive du royaume de France



Il y a 800 ans : le 27 juillet était aussi un dimanche et pourtant, malgré la trêve de Dieu, la première coalition de l’histoire européenne va essayer d’abattre la puissance naissance des capétiens du Royaume de France.
Jean-sans-terre avait formé contre Philippe Auguste  cette coalition avec Otton, l’empereur contesté d’Allemagne, Ferrand de Flandre et Renaud de Dammartin, comte de Boulogne. Lui-même avait piteusement battu en retraite devant l’armée confiée par Philippe à son fils, le futur Louis VIII, devant la Roche-aux-Moines. Philippe Auguste avait pris la tête de l’autre moitié de l’armée pour affronter les coalisés menaçant le royaume par le Nord-Est. En situation d’infériorité numérique, il prévoyait prudemment de se retrancher dans Lille. Otton décida d’attaquer l’arrière-garde française en repli, sans respecter la trêve du dimanche. Philippe Auguste fit alors effectuer une volte-face à son armée et se prépara à l’affrontement. Au centre, face à lui, l’empereur d’Allemagne, à l’aile gauche, Robert de Dreux et les alliés Bretons du roi de France opposés au félon Renaud de Dammartin et aux archers anglais du comte de Salisbury. À l’aile droite, le duc de Bourgogne fait face à Ferrand, comte de Flandre. C’est là que le sort de la bataille va se jouer car très rapidement les chevaliers français enfoncent le dispositif flamand et capturent Ferrand, ce qui leur permet de venir renforcer le centre français, tout d’abord malmené par l’assaut de l’infanterie allemande qui avait pour mission d’occire le Roi de France. Celui-ci  a même été désarçonné et dégagé in extremis par les chevaliers de sa garde rapprochée. Après la débandade de l’aile gauche des coalisés, l’aile droite française peut reporter ses efforts sur le centre allemand et met en fuite Otton dont les troupes se débandent à leur tour. Seul résiste à l’aile droite des coalisés le comte de Boulogne, qui finira lui aussi par rendre les armes. Le triomphe de Philippe Auguste est total. Il le doit à la vaillance de ses chevaliers, mais aussi, pour la première fois, à la participation des milices communales. Si l’on ajoute la participation active du clergé (frère Guérin, conseiller et véritable « chef d’état-major »de l’armée du roi, et l’évêque de Beauvais, frère du comte de Dreux), on voit se constituer les 3 piliers du Royaume de France. Cette victoire permet à Philippe Auguste d’asseoir définitivement l’autorité capétienne en son royaume, qui va prendre l’ascendant pour plus d’un siècle sur celui des plantagenêts. 

jeudi 10 juillet 2014

17 mars 1992 : fin de l’apartheid en Afrique du Sud




Nelson Mandela avait été emprisonné en 1964 à la suite d’un procès qui avait appelé l’attention et la réprobation du monde en entier sur la politique d’apartheid de l’Afrique du Sud. Mandela devint ainsi le symbole de la lutte contre cette politique. Durant sa détention au bagne de Robben Island, dont les conditions très dures visent à briser toute volonté de résistance des prisonniers, la conscience politique et la détermination de Mandela se renforcent. Il organise des séances de réflexion et d’enseignement avec les autres prisonniers. Ces séances d’échange de connaissances, en politique, mais aussi en histoire et littérature, vont faire surnommer Robben Island  « Université Mandela ». Parallèlement, Mandela au lieu de refuser tout contact avec les représentants de l’oppression, s’entretient avec les gardiens, apprend l’histoire des Afrikaners  et même leur langue.  Progressivement, il va comprendre les racines historiques du comportement de ces descendants des Boers, dont la communauté avait lutté et enduré les pires souffrances depuis 2 siècles pour ce qu’elle pensait être sa « terre promise ». À sa grande force de caractère, Mandela, « Madiba » dans la langue de son ethnie, joignait une conception humaniste du monde. Il en vint ainsi progressivement à ne plus considérer les Afrikaans comme des colonialistes oppresseurs mais à des Africains « par le sang versé », avec qui il était possible d’envisager une cohabitation. Il avait compris que le fondement de la politique d’apartheid par les Afrikaans était la terreur de voir leur communauté submergée par la démographie de la communauté noire et définitivement anéantie. À partir du milieu des années 80, le gouvernement Sud-Africain, de plus en plus isolé internationalement, va nouer des contacts avec Mandela, transféré dans une prison du Cap. Avec l’arrivée à la tête du gouvernement de Frederik de Klerk, ce dialogue devient constructif et aboutit à l’élaboration d’une constitution transitoire et à la suppression progressive de toutes les lois de ségrégation raciale. Maintenant soutenu par Mandela, Frederik de Klerk organise en 1992 un référendum qui lui donne l’assentiment des deux tiers de la communauté blanche pour adopter une nouvelle constitution égalitaire. Le 17 mars, il peut annoncer au parlement du Cap et au monde «la fermeture du livre de l’apartheid ». Le prix Nobel de la paix récompensera ces deux hommes de bonne volonté mais l’histoire retiendra la grande leçon d’humanisme donnée par « Madiba ».

1899-1902 : deuxième guerre des Boers

Les Anglais inventent les camps de concentration


Après leur victoire sur les Anglais en 1881, les Boers du Transvaal et de l’état libre d’Orange avaient reconquis leur souveraineté. La découverte d’importants gisements d’or au Transvaal déclencha un afflux massif de britanniques provenant de la colonie du Cap et un regain de convoitise de l’Angleterre pour ces territoires. Le refus du gouvernement Boer de Paul Kruger d’accorder le droit de vote à ces « uitlanders » (étrangers), ce qui aurait, à terme, donné le pouvoir aux britanniques, fut le prétexte des menaces d’intervention militaire. Sachant que la guerre devenait inévitable, le Transvaal et l’état libre d’Orange passèrent à l’attaque, à la fin de l’année 1899, contre les colonies anglaises du Cap et du Natal. Les opérations leur furent d’abord favorables, grâce aux mêmes tactiques qui leur avaient donné la victoire lors de la première guerre, mais l’arrivée massive de renforts d’Angleterre, puis d’autres états de l’Empire britannique, notamment du Canada, permirent aux Britanniques de conquérir la capitale de l’état d’Orange, Bloemfontein, et celle du Transvaal, Pretoria. Les Anglais pensaient alors avoir remporté la partie, mais les Boers organisèrent alors une guérilla, attaquant les communications et les convois anglais. Pour lutter contre ces raids, Kitchener, chef des forces britanniques, inaugura une politique de terre brûlée, détruisant les fermes des Boers et déportant massivement les familles de combattants Boers dans de vastes camps dont la clôture était assurée par du fil de fer barbelé, d’invention récente. Les premiers camps de concentration étaient nés ! 120 000 femmes, enfants et vieillards y furent internés. D’autres camps regroupèrent les personnels noirs qui avaient travaillé dans les exploitations boers, que les britanniques considéraient comme de possibles alliés des boers. Dans les camps, la mortalité par maladies et malnutrition fut effroyable. Les femmes et enfants des combattants Boers identifiés avaient des rations encore plus réduites et les Anglais le faisaient savoir pour briser le moral des combattants. C’est cependant une infirmière Anglaise, Emily Hobbhouse, révoltée par  l’inhumanité de ces camps, qui dénonça ces pratiques. De retour en Angleterre, son rapport et ses déclarations à la presse suscitèrent  l’indignation et l’envoi d’une commission d’enquête qui imposa une amélioration des conditions de détention, sans remettre en cause leur existence même.
Épuisés militairement et moralement, les Boers abandonnèrent le combat et un traité mit fin au conflit en mai 1902, en plaçant les républiques Boers sous contrôle de l’empire britannique.
Cette guerre avait coûté aux Anglais et à leurs alliés plus de 20 000 morts, dont 8 000 environ tués au combat mais la plupart à cause de maladies, dont la typhoïde. Chez les Boers et les Noirs des républiques indépendantes, 6 000 combattants, 30 000 civils Boers dont 22 000 enfants et environ 20 000 noirs perdirent la vie.

Ces deux guerres, que les Afrikaans nomment « guerres de Liberté » ont profondément marqué l’inconscient collectif et doivent être gardées en mémoire pour comprendre les épisodes suivants de la genèse de l’Afrique du Sud. 

Genèse de l’Afrique du Sud, 2° acte : le premier conflit anglo-boer




Au cours du Grand Trek les boers avaient fondé, pour s’affranchir de la domination anglaise, la république indépendante du Natal (après avoir défait les Zoulous à la bataille de Blood River) mais elle fut rapidement annexée par l’Angleterre. Ils migrèrent alors vers l’Ouest et fondèrent les républiques indépendantes du Transvaal et d’Orange. La découverte de diamants sur les rive du Vaal, avaient entraîné un afflux d’immigrés anglais dans le Transvaal et tendu plus encore les relations entre les Boers et l’Angleterre, qui décida d’annexer le Transvaal en 1877. Les Boers se soumirent dans un premier temps car ils étaient alors sous la menace d’une attaque des Zoulous et ils laissèrent les anglais les vaincre en plusieurs batailles sanglantes (1 800 morts anglais, 8 000 morts zoulous). Puis la résistance Boer s’organisa progressivement sous l’action des dirigeants Boers (Piet Joubert, descendant de huguenots français, Marthinus Pretorius et Paul Kruger). Ils passèrent à l’action en décembre 1880, en assiégeant les garnisons et en attaquant les convois anglais. Les anglais croyaient venir facilement à bout des Boers mais ceux-ci  étaient organisés en commandos mobiles constitués d’excellents tireurs formés à la chasse dès leur plus jeune âge, montés sur leurs propres chevaux et connaissant toutes les subtilités du terrain. Ils infligèrent de lourdes pertes aux anglais en refusant le combat rapproché et en abattant les combattants de loin. À la bataille de Laing’s Neck le 28 janvier1881, les anglais perdirent 200 hommes dont 4 enseignes qui portèrent successivement le drapeau du régiment, cible de choix (jamais plus les anglais n’emportèrent leurs couleurs sur les champs de bataille). En trois batailles ils démoralisèrent le commandement et le gouvernement anglais et, après la dernière bataille (Majauba, 27 février 1881), un armistice puis un traité de paix furent signés, accordant aux Boers un gouvernement indépendant sous la tutelle théorique de la royauté britannique. Pour les Boers ce n’était qu’un répit, car la découverte des gisements d’or allait bientôt raviver les convoitises d’Albion… mais ceci est un autre épisode.

Dans la famille L’Herminier...

Jeanne dessinatrice d’espoir et fraternité

Dans la mémoire collective Corse, le nom de L’Herminier est associé à l’épopée du sous-marin Casabianca et de son commandant Jean L’Herminier, dont les navettes permirent à la résistance insulaire de prendre corps. Simultanément sa sœur Jeanne (« Jeannette ») entre dans un réseau de résistance qui prend en charge et exfiltre les aviateurs et agents de renseignement alliés. Arrêtée par la gestapo en septembre 1943, elle est déportée à Ravensbrück en février 1944. Ayant trouvé et dissimulé un crayon, elle commence à dessiner ses compagnes de détention, sur des carrés blancs de censure des journaux puis des couvercles de boîtes de munitions. Ses dessins, vont donner, avec les conférences et les petites chroniques de détention de Germaine Tillion, des raisons de vivre et d’espérer aux prisonnières du camp. Jeanne L’Herminier représentait ses compagnes de malheur sans les visages, qu’elle disait ne pas savoir dessiner, mais avec des silhouettes et des attitudes étonnantes de vérité qui permettaient à chacune de se reconnaître et d’exister dans cet univers de « Nuit et Brouillard » conçu pour effacer les personnalités et les êtres.
Les dernières prisonnières  du camp de Ravensbrück seront libérées avec l’arrivée de l’Armée rouge en avril 45 ; Jeannette fera ses derniers dessins de déportation dans le wagon qui les ramène en France.
La plupart des dessins de Jeanne L’Herminier ont été précieusement dissimulés par les prisonnières et rassemblés après la libération. Ils sont exposés avec des écrits de Germaine Tillion, au musée de la Résistance et de la Déportation à Besançon.
Prenez le temps de feuilleter en ligne l’émouvant livre électronique « les  Robes grises », témoignage de fraternité et d’espérance venu du fond de l’indicible horreur des camps.